BRUNO ET CEDRIC

- Bruno, Bruno! Une fenêtre du 1er étage de la maison jaune s'ouvre et la tête de Bruno apparaît dans l'encadrement. Il sourit à Cédric, son copain qui l'appelle depuis le trottoir d'en face.

- Viens Bruno! on va faire un tour à vélo.

- Il faut que je termine mes devoirs et je viendrai tout de suite si maman me le permet, répond Bruno toujours depuis sa fenêtre.

On ne peut imaginer meilleurs amis que Cédric et Bruno. Ils habitent la même rue, vont à la même école, sont dans la même classe et s'entendent parfaitement. Ils sont si différents pourtant!

Bruno sait que si son vélo est cassé, Cédric n'a pas son pareil pour réparer un frein ou détordre une fourche faussée. Mais Cédric sait, lui, qu'il peut toujours sonner chez Bruno lorsqu'il n'arrive pas à faire ses devoirs. Bruno, patiemment, lui expliquera.

Bruno et Cédric n'imaginent pas qu'ils pourraient un jour vivre l'un sans l'autre. Pourtant la vie sépare...
Elle a commencé à les séparer lorsque Cédric a redoublé et qu'ils ne se sont plus trouvés dans la même classe. Ils se sont alors, rencontrés moins souvent sur le chemin de l'école. Et puis ce qui a pesé si lourd sur leur coeur à chacun, c'est quand un énorme camion de déménagement s'est arrêté devant la porte du logement de Bruno. Cédric sait que son copain déménage à plusieurs kilomètres de là.

- On se reverra souvent! lui a promis solennellement Bruno.

Mais bien qu'ils se soient retrouvés de temps en temps le mercredi après-midi, ils savent tous les deux que rien ne sera plus jamais comme avant. Inexorablement la vie les a séparés.

Quelques années plus tard, Cédric s'est retrouvé en apprentissage chez un électricien pour apprendre le métier. Tout en travaillant il pense encore de temps en temps à son vieux copain Bruno et se souvient avec bonheur des souvenirs heureux de leur enfance lorsqu'ils habitaient ensemble et se voyaient tout le temps. Non, ils ne se voient plus du tout et Cédric ignore même où est Bruno et ce qu'il fait.

Après son apprentissage, Cédric a été embauché dans une grande entreprise. Le soir, il se retrouve seul, après le travail dans la petite chambre qu'il a louée. Il s'ennuie... Aussi pour rompre avec sa solitude qui lui pèse de plus en plus, Cédric a commencé à fréquenter le café d'en face. Il s'y est fait quelques amis. Or un jour, il a fait la connaissance de quelques jeunes de son âge qui, de prime abord, lui ont paru particulièrement sympathiques. Ses nouveaux amis lui ont expliqué à demi mots, qu'il y avait moyen de gagner de l'argent plus facilement qu'avec un tournevis d'électricien. Que ce que les gens ne voulaient pas donner, il suffisait de le leur prendre.

C'est parce que Cédric s'est laissé convaincre et entraîner par ses nouveaux amis, qu'il s'est retrouvé un jour, menottes aux mains entre deux policiers. Oui, il a été arrêté lors d'un vol dans une banque. Plongé dans ses réflexions, Cédric sait qu'il lui faudra comparaître devant le tribunal pour y être jugé. Il risque d'être condamné à une lourde peine, peut-être une amende dont il est bien incapable de payer le premier sou.

Le jour du jugement est arrivé. Encadré par deux policiers, Cédric a été introduit dans le tribunal. D'abord il n'a rien vu qu'une grande salle froide dans laquelle sont assises plusieurs personnes. Mais tout à coup, son sang s'est glacé dans ses veines. Il a vu... vu là-bas où sont assis les juges en robes noires, celui du milieu... c'est Bruno!

Bruno le regarde de ses mêmes yeux bleus d'autrefois, mais sans qu'ils soient éclairés par cette chaude lueur d'amitié que Cédric connaissait si bien lorsqu'ils étaient enfants. Cédric voudrait l'interpeller

- Bruno, c'est moi, ton copain, ne me reconnais-tu pas ?

Lentement on énumère son nom, son adresse puis les charges retenues contre lui. Puis, comme dans un cauchemar dont il ne parviendrait pas à sortir, Cédric entend la sentence prononcée par son ancien camarade : de la prison avec sursis et une amende plus lourde que tout ce que Cédric avait imaginé. Il reste anéanti. Quelques heures ont passé. Cédric a été remis en liberté et renvoyé chez lui. Assis sur le bord de son lit, dans sa petite chambre, la tête dans les mains, il se demande comment il va faire pour payer l'énorme amende qu'on lui a infligée. Perdu dans ses sombres pensées, Cédric entend à peine qu'on frappe à la porte :

- Entrez!

La porte s'ouvre doucement : Bruno! Mais pas le Bruno en robe de juge dont les yeux vous glacent et dont la voix résonne sinistrement dans la salle du tribunal, non mais le Bruno, les yeux pétillants d'une chaude amitié.

- Est-ce que je peux entrer ?

- Comme tu veux, lance Cédric d'un ton rogue.

Mais le Bruno qui vient s'asseoir en face de lui ne ressemble en rien au Bruno du tribunal. Non, c'est le Bruno d'autrefois avec sa voix chaude qui se présente comme le bon copain de jadis. Et, alors qu'ils causent tous les deux de choses et d'autres, Cédric se dit que Bruno finalement n'a pas tellement changé. Est-ce vraiment le même homme qui siégeait, il y a à peine quelques heures au tribunal ? Est-ce vraiment lui qui a prononcé la terrible sentence ? Mais Bruno est devenu grave subitement :

- Que penses-tu faire maintenant ? demande-t-il.

L'espace d'un instant, Cédric est tenté de lui lancer à la tête :

- Je vais essayer de payer l'amende que tu m'as collée.

Mais il n'a pas le temps d'être désagréable, car déjà Bruno enchaîne :

- Écoute, j'ai acheté une maison entourée d'un immense jardin. Tu me connais, tu sais que je ne suis pas très fort pour le jardinage. Ce serait vraiment super si tu voulais venir t'en occuper. Nous habiterions ensemble, dans la même propriété et ce serait alors un peu comme autrefois.

Cédric lève la tête. Il rencontre le regard de Bruno qui le regarde interrogateur, comme autrefois quand il lui demandait de réparer son vélo.

- Mais l'amende ? balbutie-t-il.

- L'amende ? elle est payée!

Bruno dit cela simplement comme quelque chose de tout naturel.

- Alors, tu viens ?

Cédric commence alors à rêver. Cette propriété, il la voit avec son immense jardin. Il a toujours aimé s'occuper de jardinage. Et lorsque Cédric quitte pour toujours sa mansarde pour suivre Bruno dans l'escalier, il réalise que celui qui l'a condamné ce matin au tribunal, celui qui a payé l'amende et celui chez lequel il va habiter désormais, c'est une seule et même personne : Bruno son copain de toujours.

Jésus est l'ami de toujours. C'est comme Dieu qu'il a prononcé une terrible condamnation contre les péchés que nous avons commis. Mais c'est lui aussi qui en a porté la punition, lorsque sur la croix, il est mort à notre place, à ta place. C'est encore lui qui invite chacun de nous à vivre en relation avec lui. Il ouvre son ciel, comme Bruno sa nouvelle maison, à ceux pour lesquels il a donné sa vie. Connais-tu l'ami de toujours ? Connais-tu le Seigneur Jésus ?



COUPÉ EN DEUX

Imaginez, peut-être en fermant les yeux, une petite maison isolée, perdue au milieu d'une immense forêt. Dans la cuisine, Perrine balaie le sol pendant que dehors les oiseaux chantent et qu'un vent léger joue dans les branches des grands arbres. Tout à coup, Perrine sursaute, interdite. On vient de frapper à la porte d'entrée. Qui donc peut venir jusque là alors qu'il ne vient jamais personne. Posant son balai, elle va ouvrir et se trouve face à un qu'elle ne connaît pas.

- Bonjour Madame! Je vends des nouveaux testaments. C'est une partie de la Bible. Ils ne coûtent que dix francs! Ne voudriez-vous pas en acheter un ?

L'homme lui tend un petit livre bleu. Oui, Perrine voudrait bien en acheter un. Elle sent justement dans la poche de son tablier qu'elle chiffonne nerveusement entre ses doigts, une pièce de dix francs. Alors comme si elle faisait quelque chose d'interdit, elle glisse la pièce dans la main du vendeur, attrape le petit livre et referme la porte sans même prendre congé de son visiteur. Quand elle se retrouve seule, Perrine pense avec inquiétude :

Que va dire Georges, son mari ? Il travaille comme bûcheron dans la forêt et va rentrer tout à l'heure pour le repas de midi. Perrine craint ses colères, aussi se reproche-t-elle son achat. Le voilà justement qui arrive! Georges pose sa hache devant la porte et sa haute silhouette s'encadre dans la porte. Perrine sert le repas. Puis le coeur battant elle raconte la visite du matin et son nouvel achat. Georges pose sa fourchette. Le voilà qui se met en colère, et quelle colère! Il gesticule et crie :

- Comment tu gaspilles l'argent que je gagne avec tant de peine!

Perrine balbutie que l'argent et aussi à elle...

- Ah il est aussi à toi et bien regarde ce que j'en fais de ce bouquin!

Saisissant d'une main sa hache et de l'autre le nouveau testament, il le place ouvert sur le billot qui lui sert à fendre le bois pour l'hiver. D'un seul coup, il partage le livre en deux.

- Voilà pour toi, dit-il en lançant l'un des deux morceaux en direction de Perrine.

Quant à l'autre, il le fourre dans la poche arrière de son pantalon. Puis, encore plein de colère, Georges est reparti travailler au bois. Perrine, elle, a rangé sa maison, puis tirant de son tablier le livre mutilé, elle a commencé à le lire. Elle tombe sur le récit d'un jeune homme qui rentre chez son père qui l'accueille à bras ouvert. Quel dommage qu'elle n'ait pas le début du récit! Qu'avait fait ce jeune homme ? Pourquoi est-il parti ? Pourquoi rentre-t-il d'un pays éloigné ? Autant de questions qui se pressent dans son coeur. Elle brûle de connaître le début du récit. Malheureusement il se trouve sur l'autre moitié du livre, celle que son mari a fourré dans sa poche. Comment le lui demander sans qu'il se mette de nouveau en colère ?

Mais parce que ce récit pénètre son coeur, Perrine sent qu'elle n'aura pas de répit tant qu'elle ne connaîtra pas le commencement de cette belle histoire Pendant ce temps Georges travaille en forêt. Il transpire en coupant son bois. Mais qu'y a-t-il cet après-midi ? Le bois lui paraît si dur et sa hache si lourde! Il s'éponge le front. Comme il s'assied sur une souche pour se reposer un peu, il sent dans sa poche quelque chose de dur. Il sort alors le morceau du nouveau testament. Il fronce les sourcils. Mais comme il n'a rien d'autre à faire il se met à lire. Il s'agit d'un jeune homme qui après avoir exigé de son père sa part d'héritage, est parti vivre sa vie dans un pays éloigné. Là il était tombé dans la plus grande misère. A mesure qu'il avance dans le récit, son intérêt grandit.

- "Je me lèverai et j'irai vers mon père...

Malheureusement le récit s'arrête là. Là où avec sa hache il a coupé le livre en deux. La fin du récit se trouve sur le morceau que dans sa colère il a laissé à sa femme. Que faire ? Georges a soif de connaître la fin. Il ne peut tout de même pas demander à Perrine. Il aurait l'air de quoi, après s'être mis tellement en colère ? Ce soir-là, en rentrant dans son logis, Georges se demande bien comment il pourrait faire pour connaître la fin de l'histoire lue dans la forêt. Et Perrine en servant la soupe, s'interroge sur le moyen d'avoir le début du récit sans éveiller la colère de son mari. Mais il y a un Dieu qui travaille dans leurs coeurs à tous les deux. Aussi parce que Perrine sait qu'elle ne sera plus jamais tranquille tant qu'elle ne connaîtra pas l'ensemble du récit, elle s'est risquée à demander :

- Georges, dans mon livre, il est question d'un jeune homme que son père a accueilli au retour de son voyage, ne pourrais-tu pas...

Georges a sursauté :

- Comment son père l'a-t-il accueilli ? demande-t-il tout haletant.

- Mais qu'avait-il fait ? lance Perrine.

Les questions fusent. Trop pressés de connaître la partie du récit qui leur manque, ils s'interrogent réciproquement, sans prendre le temps de répondre aux questions de l'autre. Finalement ils ont approché la lampe. Tant pis pour la soupe qui refroidit dans les assiettes! Rassemblant les deux parties du livre mutilé, l'un près de l'autre ils ont lu la merveilleuse histoire de l'enfant perdu rentrant à la maison. Georges et Perrine ont réalisé combien eux aussi s'étaient éloignés de Dieu. Mais dans la petite maison de la forêt, ils ont découvert l'amour de Dieu prêt à accueillir ceux qui viennent à lui.



IL Y A PEUT-ÊTRE UN TRÉSOR CHEZ VOUS

- S'il vous plaît, Madame, pour aller avenue Clémenceau ?

Anita, assise sur le rebord du trottoir, lève les yeux vers cet étranger qui est devant elle, et qui vient de lui demander son chemin. Elle explique tant bien que mal le chemin de l'avenue Clémenceau, et l'étranger, après l'avoir remerciée, la regarde de la tête aux pieds...

- Et quand je pense, Madame, qu'il y a peut-être un trésor chez vous...

Puis il disparaît sans que Anita puisse lui demander le sens de ses mystérieuses paroles. Elle reste rêveuse, toujours sur la margelle du trottoir, ayant non loin d'elle, ses enfants sales qui jouent avec l'eau de lessive que la voisine vient de jeter dans le caniveau. Il y a peut-être un trésor chez vous. Cette parole la poursuit. Elle regarde sa maison. Peut-il y avoir un trésor derrière ses murs sales dont le crépi s'écaille ? Lorsque son mari, Julio, rentre le soir après son travail, lorsqu'elle verse la soupe dans les assiettes...

- Rien de spécial aujourd'hui, Anita ?

- Non, comme d'habitude... Ah si, quelqu'un m'a demandé son chemin, et en partant, il m'a simplement dit qu'il y avait peut-être un trésor chez nous.

La cuillère de Julio est restée en l'air

- Quoi ? Qu'est-ce que tu racontes ? Un trésor chez nous ?

- Oh! il ne m'a rien dit de plus.

- Écoute, Anita, si cet homme a dit vrai, moi, ce trésor, ça m'intéresse. Tu entends, Anita, dès demain tu vas chercher.

Le lendemain matin, Anita cherche. Mais y croit-elle vraiment à ce trésor ? Au milieu du désordre de son ménage, où pourrait-il se cacher ? Elle cherche d'abord dans les endroits simples. Tiens, qu'y a-t-il derrière cette caisse de bouteilles vides ?... Et ces habits sous ce lit, c'est l'occasion de les ranger! Anita met de l'ordre tout en cherchant. Non, elle ne trouve pas de trésor, mais sa maison prend un petit air de rangement et de propreté qu'elle n'avait pas eu depuis longtemps.Or, alors que, perchée sur un tabouret, elle range une pile de linge dans une armoire, Anita heurte de la main quelque chose de dur. Tiens, qu'est-ce que c'est ? Elle sort une boite remplie de vieilles photos.

- Ah! des photos de notre mariage... Comme on était heureux! Alors, la boisson, le mauvais caractère et toutes les tracasseries de la vie n'avaient pas encore gâché leur existence.

Elle repense à ces jours heureux, lorsque, ayant toute la vie devant elle, avec Julio, elle avait échafaudé tant de beaux projets...

Mais, qu'est-ce qu'il y a dans le fond de la boîte ? Elle fouille. Et voilà que de cette boîte qu'on n'a pas touchée depuis des années, elle sort un livre.

- Ah oui, c'était monsieur le maire, quand il nous a mariés, il nous a fait un beau discours, et puis, tout à coup, il est devenu sérieux. Anita s'en souvient comme si c'était hier, ... il a dit alors : Je vous donne la Parole de Dieu.

Sans bien savoir ce qu'elle fait, perdue dans ses souvenirs heureux, Anita tourne les pages. Non, elle ne l'a jamais ouvert, ce livre défraîchi... Mais tout à coup, alors qu'elle le feuillette, une phrase accroche son regard, et c'est comme une flèche qui atteint son coeur. Elle vient de lire quelque chose d'étrange, qui la fait presque sursauter : "J'ai de la joie en ta parole comme un homme qui trouve un grand butin." Un grand butin, mais c'est comme un trésor. Anita relit ce verset dont elle ne comprend que bien peu de choses, mais qui fait naître en elle un sentiment étrange. Elle lit encore, tourne les pages et, à force de lire, elle ne s'aperçoit pas que le temps passe, et tout à coup, c'est le pas de son mari dans l'escalier... alors, vite le livre retourne sur la dernière étagère de l'armoire.

- Alors, Anita, le trésor, tu l'as trouvé ?

- Non, non, pourtant j'ai cherché toute la journée. Julio regarde autour de lui. Il y a quelque chose de bizarre ce soir. Serait-ce l'ordre qui règne dans son logis, auquel il n'est pas habitué, ou bien ne serait-ce pas plutôt l'air étrange d'Anita ? Dans le regard de sa femme semble s'être allumée une lueur étrange qui ressemble bien à de l'espoir.

Le lendemain, lorsque Julio est reparti pour son travail, lorsque ses enfants sont sortis jouer dehors, Anita se précipite sur le livre, et elle lit, elle lit encore, elle lit toute la matinée pour s'imprégner comme une éponge trop longtemps sèche, de quelque chose qui la rafraîchit. L'après-midi, Anita lit encore, et, quand ce soir-là Julio est rentré de son travail, il ne peut s'empêcher de trouver qu'il y a quelque chose qui a changé chez lui. Ce qui le frappe tout d'abord, en enlevant sa vareuse trempée de pluie, c'est l'air étrange de sa femme. On dirait que dans ses yeux brille une gaieté, une joie, qu'il ne lui connaît pas.

- Alors, Anita, qu'est-ce qui se passe ?... L'aurais-tu trouvé, par hasard, ce trésor ?

- Pas le moindre argent, pas la plus petite pièce d'or, et pourtant...

- Écoute, Anita, moi, ce trésor, ça m'intéresse. Même si tu dois arracher la tapisserie, même si tu dois soulever les lattes du plancher, ce trésor, je le veux.

Le lendemain encore, lorsque le pas de Julio s'est éteint dans l'escalier, Anita est retournée vers son livre. Et ce soir-là, lorsque Julio est rentré, fatigué, découragé, il ne lui a même pas demandé si elle avait trouvé le trésor. Anita a servi le souper, à son mari, à ses enfants, puis c'est elle-même, parce qu'il y a quelque chose dans son coeur qui la presse, il faut qu'elle parle. Alors, lorsque les enfants, après le souper sont allés se coucher, et que Julio reste assis, allongeant sous la table ses deux jambes fatiguées, Anita a parlé :

- Julio, le trésor, je crois que je l'ai trouvé.

Julio s'est redressé :

- Allez, vite, montre, qu'on compte les pièces d'or, les diamants, et puis ferme les rideaux, que les voisins ne voient pas.

Mais devant les yeux de son mari qui commence à se mettre en colère, elle a déposé, ... rien qu'un livre.

- Comment, cela, un trésor! Mais tu te moques de moi Anita. Un vieux livre qui ne sert à rien, on n'en aura pas dix francs chez le brocanteur. Mais il en faut plus pour décourager Anita, et cela à cause de ce qui brûle en elle.

- Ne te fâche pas, Julio, on va approcher la lampe et je vais te montrer ; Tu sais, le trésor, ce n'est pas vraiment la couverture, ce n'est pas non plus ce que nous donnerait le brocanteur, mais le trésor il est à l'intérieur.

Julio, sans grande conviction, a ouvert ce vieux livre défraîchi et voilà qu'une phrase lui a sauté aux yeux : "les immenses richesses de sa grâce". Il ne comprend pas tout de ce verset, mais en levant les yeux, il voit le regard d'Anita qui brille. Oui, vraiment, elle a trouvé quelque chose, elle a trouvé quelque chose dont il a terriblement envie, lui, Julio, l'ouvrier de la fabrique. Elle a trouvé quelque chose dont lui, Julio, a besoin. Longtemps, dans la nuit, a brillé la lumière de l'appartement de Julio et d'Anita. Ils ont longtemps lu, ils ont beaucoup parlé et quelques semaines après, nous retrouvons deux voisines, un matin, qui s'en vont au marché. On parle de Julio et d'Anita :

- Qu'est-ce qu'ils ont pu changer! Eux qui étaient insupportables, surtout les enfants, polis, propres, la maison a changé d'allure, des rideaux aux fenêtres, et puis Julio, lui qui avait si mauvais caractère, gentil, prévenant, dit toujours bonjour, et quant à Anita, quelle femme remarquable!

Il y a peut-être un trésor chez vous... ce trésor, Julio et Anita l'ont trouvé, mais si toi tu ne le possèdes pas encore, il faut que tu saches que Jésus te l'offre aujourd'hui. Sa grâce, Son pardon, Son sang versé pour toi, un Sauveur, la vie éternelle, ... en un mot : Jésus, Il est aussi pour toi.



KAYARNAC

L'ouragan fait rage. Au milieu de ce désert glacé, une petite maison préfabriquée résiste courageusement à la tempête. Dans cette petite maison d'une seule pièce, John est ssis à une table. Il suce machinalement son crayon et murmure :

- A quoi bon!

Le vent qui hurle dehors domine son découragement. A quoi bon d'évertuer à apporter l'évangile aux esquimaux qui vivent dans ces contrées! A quoi bon leur parler de l'amour de Jésus! A quoi bon traduire, comme il est en train de le faire, l'évangile dans leur langue! John songe tout en continuant à sucer le bout de son crayon. Au début les esquimaux l'ont écouté mais leur curiosité s'est vite transformée en haine. John se rappelle sa dernière visite au village esquimau. Il se souvient comment face à l'hostilité qu'on lui a manifestée, il a dû s'enfuir. Il lui semble entendre encore siffler à ses oreilles le harpon que Kayarnac, le chef lui a lancé et qui s'est planté si près de son pied. Mais alors que la tempête fait rage, John perçoit d'autres bruits. On dirait un claquement, puis le jappement d'un chien. Puis tout à coup, la tempête entre dans la petite pièce en même temps que Kayarnac qui pousse la porte du pied et entre en même temps que six de ses hommes armés jusqu'aux dents. John sursaute d'abord puis baissant la tête comme absorbé par son travail, il remet silencieusement sa vie entre les mains de son Sauveur. Les hommes de Kayarnac ont envahi la petite pièce. Ils fouillent tout, déroulant le sac de couchage de John et renversant ses provisions. La tête baissée sur sa feuille, comme absorbé par sa traduction, John continue à prier son Seigneur. Il sent Kayarnac dans son dos. Il sent son regard sur son papier. Saisissant rudement la feuille, le chef demande brusquement :

- Qu'est-ce que c'est ?

Tant bien que mal John essaye d'expliquer que c'est une feuille de papier et que les petits dessins noirs sont des mots qui ensemble veulent dire quelque chose. Il se rend compte que Kayarnac fait un gros effort pour comprendre. Le papier passe de main en main.

- Alors, déclare le chef, ce papier retient ce qu'on lui dit et peut parler.

John, n'osant tourner la tête, acquiesce. Pris d'une inspiration subite, Kayarnac commande :

- Fais parler le papier

John lit alors la portion de l'évangile qu'il est en train de traduire : "Et quand ils furent venus au lieu appelé Crâne, ils le crucifièrent là et les deux malfaiteurs, l'un à la droite, l'autre à la gauche. Et Jésus dit : Père, pardonne-leur car ils ne savent ce qu'ils font." Il s'arrête. Doit-il continuer ? L'ouragan hurle toujours au dehors, pourtant dans la petite pièce est tombé un silence impressionnant. Les hommes se sont arrêtés de fouiller et se sont rapprochés de la petite table.

- Continue, demande Kayarnac

"Or il était la sixième heure et il y eut des ténèbres sur tout le pays jusqu'à la neuvième heure ; et le soleil fut obscurci..." Cette fois, John s'arrête. Il n'a pas traduit plus loin. Il se tourne alors vers Kayarnac. Son visage est étrangement sérieux et dans ses yeux, John croit voir briller une larme. Kayarnac déclare d'une voix rauque :

- Moi aussi je voudrais apprendre à connaître Jésus.

Dehors le vent se déchaîne. Mais qu'importe la tempête. Kayarnac et ses hommes se sont agenouillés. Ils ont demandé au Seigneur Jésus de devenir leur Sauveur. Et parce que Jésus est venu sur la terre pour sauver ce qui était perdu, il a effacé tous leurs péchés. John comprend alors son erreur. C'est de la Parole de Dieu que ces hommes avaient besoin. Ce que ses paroles, à lui, n'ont pas réussi à faire la Parole de Dieu l'a opéré dans ces hommes rudes.



 

KHANDY

- Khandy, qu'as-tu au bras ?

Nous étions rassemblés en famille dans notre maison, et ma mère regardait avec effroi mon bras alors qu'elle servait le repas du soir. Il est vrai que depuis quelque temps, j'avais remarqué sur mon avant-bras une tache blanche que je n'arrivais pas à faire disparaître, ni en la lavant, ni en la grattant contre les pierres. Mon père aussi regardait avec stupeur la tache blanche sur mon bras.

Depuis ce jour, mes frères m'ont tenu à distance. On m'évitait. Plus personne ne voulait jouer avec moi. Personne surtout ne me touchait. J'ai dû dormir à l'écart, dans un coin de la maison. Jamais plus depuis ce jour ma mère ne m'a pris dans ses bras, pour me parler doucement à l'oreille ; Quelque temps après, c'est au fond du jardin que j'ai dû habiter, dans une cabane de planches, que mon père a construite pour moi. Des taches blanches, j'en avais maintenant sur tout le corps. Un mot s'était imposé à moi : LÉPREUX, LÉPREUX, j'étais lépreux. Je grandissais et je devenais toujours plus malheureux.

Chaque jour, ma mère venait m'apporter, à distance, un peu de nourriture. Oh comme j'aurais voulu me précipiter vers elle et lui dire : "Maman, maman, je suis toujours ton petit garçon", mais je savais qu'au premier geste, la pauvre se serait enfuie, affolée, à la crainte d'attraper la terrible maladie. Comme elle a dû souffrir elle aussi! Puis un jour, je n'ai plus pu supporter d'habiter au fond du jardin, d'être nourri comme un chien... alors, je suis parti. Je ne savais que vaguement jusqu'alors ce qu'était un lépreux. Les lépreux étaient ceux qui venaient mendier leur nourriture à la porte de notre maison. C'était ceux à qui mes camarades et moi avions si souvent jeté des pierres pour les chasser du village. C'était ceux aussi qui, en passant, criaient : "impur, impur" pour qu'on s'éloigne d'eux. Je suis donc parti, mendiant ici et là un peu de nourriture. J'ai rencontré d'autres lépreux, et nous avons vécu longtemps loin du monde, loin des villes et des villages, loin de ceux qui nous rejetaient et ne voulaient pas de nous.

Un soir, lassé de ma misère, fatigué de cette triste vie qui était pire qu'une mort, je décidai d'en finir avec ma lamentable existence. Oui, demain, je marcherai jusqu'au fleuve, là je me jetterai à l'eau, et tout sera fini. Le lendemain matin, j'ai donc pris la direction du fleuve. En traversant les villages, j'ai crié : "impur, impur" pour qu'on s'éloigne de moi. On m'a lancé des pierres, mais bientôt, j'ai vu le fleuve miroiter sous les rayons du soleil. Mon coeur était aussi lourd qu'une pierre. Mais tout en marchant, j'ai remarqué à une vingtaine de mètres de moi, un vieillard assis sur une pierre plate, au bord du chemin. Ses cheveux et sa barbe brillaient dans le soleil du matin. Je m'apprêtais à faire un détour pour éviter qu'il ne me lance une pierre ou ne crache dans ma direction, mais au contraire, le vieillard m'appela doucement : "lépreux, lépreux, viens ici!".

Craintif, je m'approchai et le vieillard m'invita à m'asseoir à côté de lui. Il me parla doucement... de ma maladie ; il me parla aussi d'une autre maladie qui rongeait mon coeur et qui s'appelle le péché. Il me parla d'un endroit où on soigne les lépreux comme moi, mais il me parla aussi d'un certain Jésus qui pouvait guérir la maladie de mon coeur. Je sentis mon coeur se briser et des larmes me monter aux yeux. Je cachai mon visage dans mes mains et je restai ainsi longtemps, n'osant lever la tête. Quand enfin je me redressai, le vieillard était parti. Je regardai la campagne autour de moi. Quelque chose avait changé : la lumière semblait plus pure, le soleil plus radieux. Mais surtout quelque chose s'était allumé en moi, et ce quelque chose c'était de l'espoir.

Le vieillard m'avait indiqué un endroit appelé "léproserie". Oui, je voulais y aller ; J'ai longtemps marché, j'ai beaucoup cherché. Quand enfin j'ai découvert le lieu indiqué, je me suis trouvé devant un grand bâtiment blanc. Rempli de crainte, j'ai hésité à frapper à la porte ; Allait-on me chasser comme tant et tant de fois je l'avais été  ? Je finis par frapper. On m'a ouvert, on m'a souri, et on m'a fait entrer. On ne m'a pas demandé beaucoup d'explications, mais un médecin m'a examiné, n'hésitant pas à me toucher de ses propres mains, les passant sur les endroits malades. On m'a gardé dans cette maison et on m'a soigné. Un jour, une des personnes qui s'occupaient de moi m'a donné un livre.

- Lisez-le, m'a-t-elle dit avec un bon sourire, c'est la Bible, la Parole de Dieu.

D'abord je n'ai pas saisi grand chose de ma lecture. Mais un soir, j'ai lu ce que Jésus dit : "Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi". Alors j'ai compris que le vieillard là-bas qui m'avait appelé près de lui, sur le chemin, et celui qui m'avait ouvert la porte de la léproserie, et aussi le médecin et tous ceux qui s'occupaient tous les jours de moi, ils avaient tous le même maître : Jésus. Si c'est à cause de Jésus qu'ils m'ont accueilli et qu'ils me soignent avec tant de dévouement, alors ça vaut la peine de Le connaître, Lui, Jésus, le Maître. Lui pourra me guérir du péché qui me ronge. Ce soir-là, pour la première fois de ma vie, j'ai prié et Jésus m'a ouvert. À la léproserie on m'a donné des médicaments pour soigner ma lèpre, Jésus, Lui, a donné Sa vie sur une croix pour guérir mon coeur. Aujourd'hui, je suis délivré de ma lèpre. Je pourrais vous raconter avec quelle joie mes parents m'ont accueilli, quand je suis retourné à la maison, je pourrais aussi vous raconter comment, maintenant, moi aussi, j'aide à soigner les lépreux, mais ce que je voudrais vous dire avant tout, c'est que Jésus m'a aimé, qu'Il m'a pardonné tous mes péchés. Oh si beaucoup pouvaient encore apprendre à connaître Celui qui dit :

- "Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi"! (Évangile selon Jean chapitre 6 verset 37).



LA MAIN BLESSÉE

- Au feu! Au feu! C'est la grande maison là-bas qui brûle!

En effet, dans cette direction, la nuit est toute rouge et une épaisse colonne de fumée noire monte tristement dans le ciel sombre. Devant la maison, une foule de curieux s'est amassée. Dans un coin, les pompiers, impuissants, assistent aux ravages du feu. Non, il n'y a rien à faire, rien à sauver. De grandes flammes, par moment, s'échappent des fenêtres noires et lèchent la façade. Tout à l'heure, une ambulance a emporté une vieille dame. Elle vivait là, s'occupant de son petit-fils, Daniel, un garçonnet de trois ans.

Mais, au fait, où est-il, Daniel ? On a beau appeler l'enfant... pas de réponse. Serait-il resté dans la maison ? Le capitaine des pompiers se tourne vers ses hommes.

- Y a-t-il un volontaire pour chercher cet enfant ?

L'un après l'autre, les hommes baissent les yeux... Le toit peut s'écrouler d'un instant à l'autre, ce serait de la folie que de s'aventurer dans la maison, maintenant. Mais, là-bas, dans la foule, il s'est fait un mouvement, un homme s'approche de la maison. La lueur des flammes éclaire sa haute taille et ses cheveux blonds en bataille. Mais c'est le grand Jim! Il disparaît bientôt dans la maison. Aveuglé par la fumée, tenant son mouchoir devant son nez pour ne pas s'asphyxier, Jim monte l'escalier déjà rongé par le feu. Au premier étage, il aperçoit une porte ouverte et là, dans une chambre, Daniel dort dans son petit lit. Sans prendre la peine de le réveiller, Jim le saisit dans ses bras. A ce moment, un craquement sinistre se fait entendre. C'est l'escalier qui vient de s'effondrer.

- Comment descendre maintenant ?

s'interroge Jim, il aperçoit alors, le long du mur, une conduite d'eau placée verticalement juste à l'endroit où était l'escalier. Jim n'hésite pas. Tenant Daniel d'un bras, il saisit le tuyau de sa main libre et se laisse couler jusqu'au rez-de-chaussée. Le contact du tuyau brûlant lui arrache un cri de douleur. La paume de sa main droite est horriblement brûlée. Bientôt Jim et Daniel se retrouvent au milieu de la foule. Jim a été soigné, Daniel aussi, mais Jim sait que sa main ne sera plus jamais comme avant.

Quelques jours plus tard, c'est dans une salle de tribunal que nous retrouvons le grand Jim. Le juge pour enfants est bien embarrassé :

- Que faire de cet enfant ?

Daniel a échappé à l'incendie, mais sa grand-mère n'est plus là pour s'occuper de lui. N'y aurait-il pas dans la contrée une famille sérieuse qui pourrait accueillir cet enfant ? Dans la salle, un homme s'est approché. De ses cheveux blonds il domine l'assistance, c'est Jim.

- Monsieur le juge, l'enfant m'intéresse.

Le magistrat fronce les sourcils. Jim n'est pas précisément le type de personne que le juge souhaitait pour Daniel.

- Et qu'avez-vous à alléguer pour que nous vous confiions l'enfant. - Monsieur le juge, je n'ai qu'un argument, le voici :

et devant l'assistance silencieuse, Jim montre sa main blessée. Dans le tribunal, tout le monde se tait. Le juge, visiblement touché par un tel argument, cède et décide de confier l'enfant à Jim. Et c'est ainsi que les jours suivants, on a pu voir dans les rues, une grande silhouette tenant par la main un petit garçon.

- Alors, Jim, lui crie-t-on de temps en temps, tu as changé de métier, voilà que tu t'occupes d'enfant.

Mais il ne s'agit pas de plaisanter trop sur son dos, car on sait qu'il a les poings durs et qu'il n'est pas toujours de bonne humeur, surtout quand il sort du café. Le temps a passé, Daniel a grandi. Jim n'a pas cessé de l'entourer de ses soins. Sa vie... c'est cet enfant. Un jour, ils vont tous deux visiter une exposition de tableaux. Jim tenant la petite main de son fils adoptif, passe devant toutes sortes de tableaux, tout à coup Daniel s'arrête :

- Dis papa, c'est qui le monsieur sur le tableau ?
- Eh bien, c'est Jésus...
- Dis papa, pourquoi Il a des trous dans les mains ?
- Ben... parce qu'on L'a cloué sur une croix.
- Mais... pourquoi L'a-t-on cloué sur une croix ?
- Parce qu'on ne L'aimait pas et qu'on voulait Le tuer.
- Mais pourquoi on ne L'aimait pas ?

Jim se sent mal à l'aise... Pourquoi on ne L'aimait pas ? Il ne s'est jamais posé la question. Il essaye de tirer son petit compagnon par la main, vers les autres tableaux... Peine perdue, Daniel reste fasciné par celui qui représente Jésus.

- Dis papa, pourquoi on ne L'aimait pas ?

Jim se gratte la tête, puis rassemblant tout ce qu'il sait sur la question, il déclare :

- Jésus a été cloué sur une croix pour sauver les hommes... mais viens voir les autres tableaux.

Daniel, à contre coeur, se laisse entraîner. Il reste silencieux un moment puis... Jim tressaille en entendant Daniel déclarer :

- Alors papa, Jésus, c'est comme toi. Jésus, on Lui a cloué les mains, et toi, tu as eu la main brûlée pour me sauver de l'incendie.

Jim ne sait pas pourquoi, mais la remarque de Daniel le met mal à l'aise. Et ce soir-là, après que Daniel soit couché, Jim est resté à côté de lui, assis sur une chaise. Bientôt on n'entend plus rien, si ce n'est la respiration régulière de l'enfant qui dort. Plongé dans ses réflexions, Jim songe à ce que Daniel a dit tout à l'heure : Jésus, c'est comme toi! Non, Jésus ce n'est pas comme lui ; il le sait bien. sa vie repasse devant lui : ce sont les soirs où, titubant, il rentrait du café. Et puis sa méchanceté envers les autres qui lui a créé tellement d'ennemis. Que de mal, que de péchés, il a accumulés. Non Jésus, ce n'est pas comme lui. Et pourtant, jamais auparavant, il n'avait vraiment compris pourquoi Jésus a été cloué sur une croix. Serait-ce aussi pour lui, Jim, que Jésus est mort ? Alors, dans cette petite chambre dans laquelle dort son petit protégé, pour la première fois de sa vie, Jim s'est mis à genoux, il a demandé au Seigneur Jésus de le sauver. Et parce que Jésus dit dans Sa Parole :

- Je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi,

ce soir-là, Jim est devenu, lui aussi, un racheté du Seigneur. Il a regardé le petit lit dans lequel Daniel repose paisiblement. Il a été le moyen de sauver cet enfant des flammes de l'incendie, mais la remarque de Daniel n'a-t-elle pas été le moyen que Dieu a employé pour le sauver, lui Jim, du jugement. Jésus a été blessé, Il est mort sur la croix, est-ce aussi pour toi ?



LE VISITEUR DE MIDI

A voix basse, Monsieur le Curé parle avec le bedeau, c'est-à-dire le concierge de l'église.

- Avez-vous remarqué cet homme qui entre tous les jours à midi dans l'église ?
- Eh bien, c'est tous les jours pareil, il entre, reste une dizaine de minutes, puis s'en va comme il est venu. Sa mine ne m'inspire pas, et vous savez que les décorations de l'autel sont en or et valent très cher.
- Essayez donc de le surveiller un peu.

Le lendemain, un peu avant midi, le bedeau se met à guetter l'homme. Comme d'habitude, la porte s'ouvre, il pénètre dans l'église et reste immobile quelques instants. Mais juste avant qu'il ne s'en aille, le bedeau s'avance :

- Hep, vous là-bas, comment vous appelez-vous ?
- Je m'appelle Simon.
- Et qu'est-ce que vous venez faire comme cela tous les jours à midi dans l'église ?
- Oh, rien... ou plutôt, voyez-vous, j'entre, j'attends un moment, puis je dis : Jésus, c'est Simon. Je reste encore un peu et puis je m'en vais.

Un jour, pourtant, Simon ne vient pas dans l'église. Il s'est fait renverser par une voiture en traversant la rue. Une ambulance l'a recueilli, tout meurtri et l'a conduit à l'hôpital voisin. Simon a été mis dans la chambre 223 dans laquelle il y a déjà plusieurs malades. De tous, c'est lui le plus atteint. Pourtant, quel changement depuis son arrivée. Il remplit la chambre 223 d'une bonne humeur communicative. On a même vu rire les plus grincheux. Liliane, une des infirmières s'interroge. Elle finit par questionner les malades.

- Oh, depuis que Simon est là, comment voulez-vous qu'on se plaigne, lui si malade est toujours de bonne humeur. Liliane s'arrête devant le lit de Simon.

- Ce qui me rend si heureux ? Eh bien, c'est mon visiteur de midi.

Liliane sort de la 223 très perplexe. Elle ne se souvient pas avoir vu personne visiter Simon. Elle se renseigne auprès d'une de ses collègues.

- Quoi, un visiteur tous les jours pour Simon ? Mais ma pauvre Liliane, il est seul au monde, cet homme, pas de parents, pas de famille et depuis qu'il est entré dans le service, personne n'est venu le voir. Il t'a raconté une histoire ou bien il délire. Liliane, de plus en plus perplexe s'en retourne près du lit de Simon.

- Vous dites que vous avez de la visite tous les jours ?
- Oui, vous ne Le voyez peut-être pas, mais tous les jours à midi, Il entre, Il se met au bout de mon lit, Il reste un instant, puis Il dit : Simon, c'est Jésus.



L'HOMME LE PLUS RICHE DE LA VALLÉE

Devant la fenêtre de sa chambre à coucher, monsieur Godard s'étire. Oui, vraiment, il a très bien dormi. Là-bas, derrière les montagnes, le soleil vient de sortir, et la journée s'annonce superbe. Jamais monsieur Godard ne s'est senti plus en forme, jamais la vie ne lui a semblé plus belle. Et pour bien commencer sa matinée, il fait seller son cheval pour faire le tour de l'immense domaine dont il est la riche propriétaire. Bientôt le voici à cheval dans la fraîcheur du matin, admirant fleurs et arbres sur les feuilles desquelles la rosée n'a pas eu le temps de sécher. Son cheval foule une herbe qu'on sent épaisse. Le regard du cavalier se perd dans l'immense vallon. Tout ceci est à moi, pense-t-il non sans fierté. Tout là-bas, il aperçoit le vieux Hans, son fidèle fermier. Il a déjà fauché et est assis à l'ombre d'un grand arbre. Monsieur Godard lance sa monture dans sa direction. – Ohé, Hans, comment allez-vous aujourd'hui ? Mais Hans, au lieu de répondre, le visage baissé semble parler tout seul. Ce n'est que lorsqu'il entend le cheval juste à côté de lui que Hans tressaille et se redresse. – Oh, excusez-moi, monsieur, je ne vous avais pas entendu arriver... Faut dire que je deviens sourd... – Pourtant vous avez toujours votre bon sourire heureux. – Heureux, ah monsieur! comment ne le serais-je pas. J'ai tant de raisons de l'être. J'ai tout ce qu'il me faut, un toit, une bonne nourriture, c'est plus que ce que possédait mon Sauveur quand il était sur la terre. D'ailleurs c'est justement Lui que je remerciais, pour la nourriture qu'Il me donne. Monsieur Godard jette un coup d'oeil sur le pauvre casse-croûte de Hans qui est étalé sur l'herbe : un morceau de fromage et trois tranches de pain de seigle. C'est donc pour cela que Hans remercie son Dieu. Monsieur Godard ne peut s'empêcher de penser à sa salle à manger, sa vaisselle en cristal, son couvert d'argent qu'en ce moment même on doit installer pour son prochain repas. Mais le vieux Hans continue : – Oh, monsieur, j'ai fait un rêve étrange cette nuit. J'ai rêvé du ciel, c'était magnifique, et puis j'ai entendu une voix qui disait : "L'homme le plus riche de la vallée mourra cette nuit" après quoi je me suis réveillé. Monsieur Godard a de la peine à cacher le malaise que lui apporte ce rêve étrange. L'homme le plus riche de la vallée... c'est lui, bien sûr... Et, lorsque sur son cheval, il quitte Hans, il se sent beaucoup moins bien qu'il y a un instant. – Bah! je ne vais tout de même pas me gâcher ma journée à cause du rêve de ce vieux fou... Mais a-t-il vraiment le coeur en bon état ? N'aurait-il pas de la fièvre, il sent comme un malaise... Aussi écourte-t-il sa tournée pour rentrer dans sa magnifique demeure. Pendant que quelqu'un conduit son cheval à l'écurie, monsieur Godard monte l'escalier monumental qui conduit à la porte d'entrée. Il se sent nerveux, inquiet, préoccupé, et à vrai dire plus très en forme. L'homme le plus riche de la vallée mourra cette nuit... Cette parole de Hans l'inquiète. Aussi la première chose qu'il fait en rentrant, c'est de décrocher le téléphone : – Allô, docteur Dubois, oui, ne pourriez-vous pas passer cet après-midi... Non, je ne suis pas malade, mais venez quand même ... oui, un contrôle de mon état général. A tout à l'heure, docteur! Pendant le début de l'après-midi, monsieur Godard n'arrive à s'intéresser à rien. Il tend l'oreille, attendant le fameux coup de sonnette qui amènera le médecin. C'est en plus un de ses bons amis, que monsieur Dubois, à lui il pourra se confier. Dring...! Ah, le voilà! – Entrez, monsieur Dubois. Je suis bien heureux de vous voir. Monsieur Dubois dévisage son interlocuteur. – Eh bien, monsieur Godard, vous avez excellente mine, ne me dites pas que vous avez besoin d'un médecin. Le visage du riche propriétaire se rembrunit. – Pourtant, si vous vouliez bien m'ausculter et me dire ce que vous pensez de ma santé. Le docteur s'exécute. Sortant son stéthoscope, il examine minutieusement son patient. L'examen terminé, il lève les yeux sur le visage anxieux de monsieur Godard. – Je crois que vous n'avez jamais été aussi bien portant. Mais dites-moi donc ce qui vous tracasse, ce qui ne va pas. – Eh bien, c'est mon fermier, le vieux Hans, qui m'a bien alarmé ce matin, il m'a dit qu'il a rêvé... que l'homme le plus riche de la vallée allais mourir cette nuit. – Ha! Ha! Ha!, Mon pauvre ami, et c'est cela qui vous tourmente ? – Oui, c'est cela, vous riez, mais très honnêtement, moi, j'ai peur. – Bon, écoutez, voilà ce que je vous propose. Vous allez rester toute la soirée dans votre salon, vous allez chasser ces idées noires, et, tenez, pour vous distraire, je me propose de passer la soirée avec vous. – Bien volontiers, docteur, nous souperons ensemble, et nous causerons toute la soirée. La nuit tombe bientôt sur l'immense domaine, et sur le beau logis de monsieur Godard. Monsieur Dubois essaie, par sa conversation enjouée, de distraire son hôte. La lourde horloge, là-bas, de l'autre côté du salon sonne neuf coups, neuf heures... La bonne humeur de monsieur Dubois est communicative. Monsieur Godard se détend, il pense moins à Hans, son vieux fermier. Dix heures trente... – Monsieur Dubois, ne voulez-vous pas passer la nuit ici ? Il est tard, et je serai bien heureux de vous savoir sous mon toit. – Si vous voulez, mais surtout, ne vous inquiétez pas. L'horloge vient à peine de sonner onze heures, que la sonnette de la porte de la maison retentit. Monsieur Godard sursaute et se lève comme un ressort. – Qui est là! Il se précipite vers la porte, suivi du docteur, et ouvre : devant la porte, se tient un paysan, chapeau bas. – Qu'y a-t-il ? – Oh, monsieur, je viens simplement vous dire que le vieux Hans... vient de mourir... Monsieur Godard reste interdit. L'homme le plus riche de la vallée ? C'était donc lui. Regagnant le salon, il pense à son vieux fermier, à son bout de fromage, mais à son sourire tellement heureux ; Bien sûr, il possède lui, monsieur Godard, un immense domaine, mais Hans ne possède-t-il pas le ciel ?... Son regard se promène sur les objets qui remplissent son salon. Ses tapis coûteux, son mobilier rare, ses tapisseries de prix... Combien cela lui paraît fade en comparaison du trésor de Hans : la vie éternelle, un Sauveur! oui, l'homme le plus riche de la vallée est mort cette nuit, mais cette richesse, monsieur Godard désire maintenant la posséder aussi. Et toi, es-tu riche quant à Dieu ? Jésus est venu sur la terre nous apporter le salut, la vie éternelle. Son sang précieux a coulé aussi pour toi. Possèdes-tu ces trésors ? Ils peuvent être à toi maintenant, en croyant en Jésus qui t'a aimé jusqu'à mourir sur la croix pour te sauver.



L'OFFRE DE LORD CONGLETON

Lorsque ce matin-là le soleil est sorti de derrière la colline, ses rayons ont éclairé le clocher de l'église avec sa grosse horloge puis les toits des fermes du village sont sortis de l'obscurité. Sur le flanc de la colline, au-dessus du village, apparaît aussi une grande et belle maison que tous les villageois connaissent bien.

C'est là que demeure Lord Congleton.

Il n'y a pas au village un seul paysan qui n'ait, un jour ou l'autre, pris le chemin qui mène chez lui pour lui emprunter de l'argent. L'un en avait besoin pour réparer sa grange, l'autre pour payer le vétérinaire. En fait, tout le village doit de l'argent à Lord Congleton, même si personne n'en parle jamais. Or ce matin-là, lorsque, sa pioche sur l'épaule, Théo traverse la place pour se rendre à son travail, son attention est attirée par une grande affiche qui n'était pas là la veille.

Il s'en approche et lit  :

Celui qui viendra chez moi aujourd'hui, avant midi, avec la liste complète de ce qu'il me doit sera délivré de toute sa dette.

signé  : Lord Congleton

L'horloge de l'église sonne alors 9 heures. Ce message lui paraît étrange et Théo ne sait que penser. Il flâne sur la place, autour de la fameuse affiche, espérant que quelqu'un d'autre arrivera et la remarquera. Or voilà justement Adrien qui arrive à proximité de la fameuse affiche. Théo l'observe du coin de l'oeil.

Adrien se plante devant l'affiche, met ses lunettes et lit  :

Celui qui viendra chez moi aujourd'hui, avant midi, avec la liste complète de ce qu'il me doit sera délivré de toute sa dette.

Adrien se redresse et aperçoit Théo qui joue l'indifférent. Il part alors d'un grand éclat de rire  :

– Quelle blague ! Le vieux sur la colline veut s'amuser à nos dépens. Ce n'est pas moi en tous cas qui irait me laisser prendre à cette farce.

Mais pendant que Théo et Adrien causent, voilà Julien qui s'approche. Il tient à la main sa faux parce qu'il va chercher de l'herbe pour ses lapins. Lui aussi remarque l'affiche. Il la lit puis il regarde les autres qui l'observent sans en avoir l'air.

Julien hausse les épaules  :

– Cela ne me concerne pas, dit-il ; je ne lui dois rien ! Julien ment.

Il sait que la liste de ses dettes envers Lord Congleton est longue  ; mais par vantardise, il essaye de faire croire aux autres qu'il ne lui doit rien. Théo ne dit rien mais Adrien continue à rire en affirmant que c'est une blague destinée à tromper les naïfs.
N'en est-il pas de même de la bonne nouvelle du salut que Jésus présente à tout pécheur. Comme Théo, certains ne savent que faire et se fient à la réaction des autres. Comme Adrien, d'autres s'en moquent.

D'autres encore, comme Julien, clament qu'ils n'en ont pas besoin. Ils ne se rendent pas compte qu'ils sont des pécheurs perdus et loin de Dieu. Mais voilà Claude ! Sous le regard attentif des autres, il s'approche de l'affiche, la lit puis soupire découragé :

– Çà c'est bon pour les autres, mais pas pour moi  ; je lui dois tellement ; jamais il ne me remettra tout ce que je lui dois.

Accablé, il appuie son menton sur le manche de sa bêche. La pendule de l'église sonne alors 10 heures. Serais-tu comme Claude  ? peut-être penses-tu être un trop grand pécheur et que Jésus sauve des moins méchants que toi.
Un groupe de plus en plus important s'est formé autour de l'affiche. Chacun donne son avis saut Théo qui ne dit rien  ; il écoute ce que disent les uns et les autres. Adrien, lui, se moque tant il peut, essayant de faire rire son entourage. Julien continue à affirmer à qui veut l'entendre qu'il n'est pas concerné par l'affiche, puisqu'il ne doit rien à personne. Quand à Claude, il soupire en regardant tristement le sol.

Personne d'abord ne remarque François. Il s'est glissé jusqu'à l'affiche et la lit attentivement  :

Celui qui viendra chez moi aujourd'hui, avant midi, avec la liste complète de ce qu'il me doit sera délivré de toute sa dette.

signé Lord Congleton

Chacun s'arrête de parler en entendant François s'écrier  :

– Quelle bonne nouvelle ! Je vais y aller tout de suite.

Théo ouvre alors des yeux ronds. Adrien renverse la tête en arrière et éclate de rire

– Pauvre François, et dire qu'il y croit !

Julien toise François, l'air méprisant :

– Tu lui dois donc de l'argent !

Claude considère François avec envie. Mais François ne s'embarrasse pas des autres ni de ce qu'ils pensent. Abandonnant sa brouette au beau milieu de la place, le voilà qui court chez lui et en revient avec à la main la liste de toutes ses dettes. Sans s'occuper des remarques qui fusent, il prend le chemin qui monte vers la belle demeure de Lord Congleton. L'horloge sonne 11 heures.
Curieusement aucun des habitants du village ne songe à aller à son travail. Au contraire, ils ont tous suivi François jusqu'à la grille qui entoure la maison de Lord Congleton. Théo y va sans rien dire.

Adrien, avec l'intention de bien s'amuser. Julien y va en spectateur, affirmant qu'il n'est pas concerné. Claude soupire pendant tout le chemin. Depuis le portail du jardin chacun voit François frapper à la porte d'entrée de la maison.
C'est Lord Congleton lui-même qui vient lui ouvrir et qui le fait entrer. La porte se referme, laissant chacun faire des commentaires sur ce qui va arriver. Là-bas, au village, l'horloge sonne 11 heures et demie.

Lord Congleton a introduit François dans son bureau et l'a fait asseoir.

– Vous avez donc cru, François au message que j'ai affiché sur la place.

Le visage radieux, François répond  :

– O oui, monsieur, n'y avait-il pas votre signature  ?

Lord Congleton a saisi alors la longue liste des dettes que François lui tend et de sa belle écriture il a écrit un seul mot  : "payé" puis il a signé. Dans le silence du bureau de Lord Congleton on entend l'horloge du village sonner midi moins le quart. Le coeur débordant de reconnaissance, François a dit toute sa gratitude à Lord Congleton. Puis saisissant le papier, il se lève pour s'élancer dire aux autres sa joie d'être délivré de toutes ses dettes.

Mais Lord Congleton l'arrête  :

– Attendez, François. Vous êtes délivré de vos dettes parce que vous m'avez cru  ; il faut que les autres aussi me fassent confiance.

Asseyez-vous, nous allons causer un peu.

Quelle joie pour quelqu'un qui fait confiance au Seigneur Jésus pour être sauvé. C'est aujourd'hui que Jésus sauve. Il a donné sa vie sur la croix pour délivrer de leurs péchés tous ceux qui viennent à lui.

Lorsque midi sonne, François se précipite dehors, brandissant son papier  :

– Payé, délivré, je suis délivré !

Aussi vite qu'ils ont pu, Théo, Adrien, Julien et Claude ont quitté la grille pour chercher chez eux la liste de leurs dettes, et c'est presque en même temps qu'ils se sont rués sur la porte de Lord Congleton. Ils ont frappé, tambouriné, crié, jusqu'au moment où Adrien a remarqué sur la porte un petit écriteau de papier sur lequel il était simplement écrit  :

"trop tard"

La porte est restée fermée.
Aujourd'hui Jésus t'offre son salut, la délivrance de tous tes péchés. Il en a subi la terrible punition lorsqu'il est mort sur la croix. Hâte-toi, un jour il sera trop tard.



PEPITA

– 40 écus pour mon tableau du Christ en croix  ?

– Non, Mr le curé, ce que vous m’offrez n’est pas suffisant. J’ai passé trop de temps pour peindre cette scène de la crucifixion et je ne veux pas la solder.

– Comme vous voudrez, mais réfléchissez encore ! ajoute le curé en quittant l’atelier de Domenico, le peintre.

L’artiste a d’autres projets en tête. Il souhaite peindre, entre autre, le tableau d’une danseuse espagnole.Or voilà qu’un jour, alors qu’il flâne aux abords d’un camp de gitans, il aperçoit une jeune fille qui peut avoir une quinzaine d’années en train de danser aumilieu d’une clairière. Sa longue chevelure d’un noir d’ébène vole au vent au gré des mouvements de la danse.Domenico s’approche. Quel magnifique tableau elle ferait ! murmure-t-il, tout en l’observant de son regard d’artiste. La danse terminée, il s’approche encore  :

– Comment t’appelles-tu  ?

– Pépita, répond la jeune fille un peu effarouchée

– Je suis peintre  ; peux-tu demander à tes parents de te laisser venir dans mon atelier  ; tu me servirais de modèle et je te donnerais des sous  ?

Quelques jours plus tard, Pépita se présente à l’atelier de Domenico. Celui-ci lui fait prendre la position dans laquelle il souhaite la peindre.

– Tourne-toi plus à droite et regarde le tableau qui est posé contre le mur.

Or le tableau posé contre le mur est justement le Christ crucifié que Domenico a refusé de vendre au curé. Le silence se fait. On n’entend que le crayon de l’artiste ébaucher la silhouette de la jeune gitane. Sans bouger celle-ci fixe le tableau de la crucifixion. Mais au bout d’un moment elle ne peut s’empêcher de demander  :

– Comment s’appelle celui qui est au milieu  ?

– C’est le Christ répond distraitement Dominico, sans lever le nez, et tout en continuant à dessiner.

Mais après quelques minutes de silence Pépita reprend  :

– Mais qu’est-ce qu’on lui fait  ?

– On le cloue sur une croix, répond le peintre toujours absorbé par son travail.

– C’était donc un très méchant homme…  ?

– Non, répond l’artiste, il n’avait fait que du bien… Mais si tu me parles tout le temps je ne peux pas me concentrer  ; garde bien la position, c’est tout ce que je te demande.

Pépita n’ose plus questionner le peintre même si une multitude de questions se pressent dans son esprit et dans son cœur. Enfin la séance se termine.

– Au revoir, Pépita ! N’oublie pas la prochaine séance… mercredi prochain.

Le mercredi suivant, lorsque Pépita arrive, elle se dirige directement vers le tableau du Christ crucifié.

– Mais pourquoi l’a-t-on cloué sur une croix alors qu’il n’avait fait que du bien  ?

Domenico sait que la jeune gitane ne lui laissera pas de répit tant qu’il n’aura pas répondu à ses questions.

– Écoute, Pépita je vais te raconter l’histoire de Jésus, comme cela après tu me laisseras tranquille et je pourrai travailler en paix.

À la jeune fille bouleversée, il parle alors, de la vie de Jésus, puis de son arrestation et enfin de sa crucifixion. Domenico raconte cela sans émotion  ; c’est une vieille histoire qui le laisse totalement indifférent.

– Allez ! Maintenant en place, Pépita que je puisse continuer mon tableau.

Pendant toute la séance, la jeune gitane reste silencieuse, mais l’intensité du regard qu’elle fixe sur la scène de la crucifixion en dit long sur les pensées qui se pressent dans son cœur. La séance terminée, elle prend congé du peintre et dit simplement  :

– Vous devez beaucoup l’aimer, ce Jésus puisqu’il a souffert tout cela pour vous.

L’artiste sursaute  ; non, il n’avait jamais pensé à cela. Les mois ont passé. Le tableau de la danseuse espagnole est fini depuis longtemps sans que Domenico ait pu se débarrasser de la remarque de la jeune gitane.

– Vous devez beaucoup l’aimer, ce Jésus puisqu’il a souffert tout cela pour vous.

Enfin un jour un chrétien explique à Domenico que si lui, n’avait éprouvé jusque là qu’une froide indifférence vis-à-vis de Jésus, au contraire Jésus Christ l’avait aimé jusqu’à se laisser crucifier pour le délivrer de tout ce qu’il avait fait de mal. L’amour de Jésus touche alors la peintre jusqu’au plus profond de lui-même et c’est le cœur brûlant de reconnaissance que Domenico reprend ses pinceaux. Il veut désormais que sa peinture soit un message pour que d’autres apprennent à connaître l’amour du Sauveur.Il peint alors plusieurs tableaux qui sont présentés avec la scène de la crucifixion lors d’une exposition dans la ville où il habite. Souvent le peintre se rend à l’exposition pour guetter les réactions des visiteurs. Or un jour il remarque quelqu’un immobile devant la scène de la croix. Il s’approche  :

– Pépita !

La jeune fille tourne alors vers lui un visage baigné de larmes.

– Oh ! dit-elle en désignant le tableau, s’il avait pu aimer une gitane comme moi…

– Mais, Pépita ! Il est mort aussi pour toi.

Ce soir-là, jusqu’à ce que l’exposition ferme ses portes, le peintre parle à la jeune gitane de l’amour de Jésus pour quiconque vient à lui. Et lorsque la jeune fille quitte le peintre pour rejoindre les siens, elle sait que c’est aussi pour elle que Jésus est mort sur la croix.

Cette parole est certaine et digne d’être pleinement reçue  : le Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs. 1 Timothée 1. 15



TU AS MENTI

Sur le chemin là-bas, qui traverse la campagne, un homme galope sur son cheval. Déjà vers les collines, les ombres s'allongent, car la nuit ne va pas tarder à tomber. Le cavalier s'inquiète. Il aurait tant voulu arriver à la ville avant la nuit car les routes ne sont pas sûres. Il doit traverser une forêt qui a mauvaise réputation. Il sait aussi que sa bourse est bien garnie. Aussi, tout en galopant, prie-t-il instamment le Seigneur Jésus qu'il connaît comme son Sauveur. Oh, j'ai bien fait, se dit-il à lui-même de coudre mes plus beaux écus dans la doublure de mon manteau. C'est plus sûr. Et pour la centième fois, il passe sa main sur l'étoffe de son manteau pour s'assurer que les pièces sont bien là. Lorsque son cheval pénètre dans la forêt, la nuit est tombée complètement. Il distingue vaguement le contour du chemin et la silhouette sombre des grands arbres qui se détachent sur un ciel rempli d'étoiles. Non, il n'est pas très rassuré. Tout à coup, dans le silence de la nuit :

– HALTE!

Çà y est, les brigands! Mort de peur, il distingue des hommes armés qui l'entourent bientôt. Celui qui semble être le chef le saisit et l'oblige à descendre. Puis il distingue dans le reflet que projette la lune un grand poignard qu'on lui met sous la gorge :

– La bourse ou la vie  ?

Il n'hésite pas, fouillant sa poche, il tend d'une main tremblante sa bourse que le bandit saisit ;

– Tu n'as plus d'autre argent  ?

– Non, non je vous ai tout donné.

– N'essaye pas de nous tromper si tu tiens à ta peau.

– Je vous assure que c'est là toute ma fortune.

– Eh bien... dans ce cas, si tu ne veux pas tâter de cela... déguerpis!

Et, remontant à cheval, le voyageur n'a qu'un souci, mettre le plus de distance possible entre ces voleurs et les sabots de son cheval. Oh la bonne idée d'avoir cousu mes plus beaux écus dans la doublure de mon manteaux! Avec sa main, il sent ses pièces sous son manteau. Le clame est retombé sur la forêt. Il n'entend plus que le galop de son cheval, et là-haut le vent qui chante dans les feuilles des grands arbres. Mais alors qu'il se remet lentement de sa frayeur, il entend une voix : Tu as menti! Mais qui donc me parle ? Pensant qu'il a mal entendu, il continue sa route. Tu as menti! Oh, qu'importe, à des brigands! Il continue toujours, intrigué et pas très tranquille. Tu as menti! Non ce n'est pas le vent dans les branches, ni non plus les pierres sous le sabot de son cheval. Il se rend compte que la voix qui lui crie : "Tu as menti" vient de l'intérieur... Sa conscience. Sa conscience qui le rend malheureux. Il sent qu'il n'aura pas de répit tant qu'il n'aura pas réglé ce problème. Oui, il a menti et il sait que son Sauveur ne peut pas l'approuver. Il essaye d'oublier tout ce qui s'est passé lorsqu'il a été détroussé par les brigands. Et pourtant, plus il essaye d'oublier, et plus la voix se fait insistante : Tu as menti! Tu as menti!

Il arrête son cheval. Et, chose étrange, le voilà qui fait demi-tour. Il refait en sens inverse le chemin qu'il vient de parcourir au galop. Il arrive à l'endroit de l'attaque, ce lieu qu'il avait été si pressé de quitter. Non, les brigands ne sont plus là. Mais là-bas, dans la forêt, il aperçoit une lueur qui brille dans la nuit. Attachant son cheval, il s'approche, guidé par la lumière. Maintenant, il voit mieux. C'est un grand feu, les brigands sont assis autour. Il reconnaît le chef qui lui tourne le dos. Il avance encore.

– Hum...

Les brigands sursautent. Le chef se lève.

– Qui va là  ?

Le voyageur s'approche assez près pour entrer dans le cercle lumineux que projette le feu.

– Mais qu'est-ce que tu fais là ? Tu veux donc mourir  ?

– Je suis venu vous dire que... je vous ai menti.

– Quoi  ?

– Oui je vous ai dit que je n'avais qu'une bourse, or j'ai aussi des écus cousus dans la doublure de mon manteau.

– Et c'est pour cela que tu es revenu  ?

– Oui, parce que je connais Jésus. Il m'a sauvé et je désire Lui obéir, alors... je ne veux pas mentir. Le feu crépite, les brigands se taisent. Ils regardent d'un air étrange cet homme qui vient pour leur dire qu'il a menti. Si lui a menti, et nous alors! Tous les brigands se sont levés. Leur conscience atteinte leur reproche tous leurs brigandages. Ils s'approchent. Un grand désir s'est emparé en même temps de chacun que l'étranger parle, qu'il parle encore de ce Seigneur Jésus dont ils ont tous tant besoin. La lune s'est levée dans le ciel rempli de millions d'étoiles et autour de ce feu sur lequel personne ne pense à jeter du bois, les brigands se sont agenouillés devant ce Jésus qu'ils ne voient pas. Ils Lui ont dit qu'ils étaient de très grands pécheurs, mais ils ont appris aussi qu'Il est un très grand Sauveur prêt à pardonner même à des brigands qui se repentent.



TU NE SERAS PAS ATTEINT

 

- La mission que je vous confie est importante, mais elle n'est pas sans danger.

Nous sommes au Vietnam, pendant la guerre. Debout, dans un petit bureau, Edouard et Bruno suivent l'itinéraire que le colonel leur indique sur la carte. Il s'agit d'apporter des documents secrets au quartier général, à quelque deux cents kilomètres de là. Quelques instants après, la voiture est prête : Edouard s'installe au volant, Bruno à côté, et la voiture démarre. Ils roulent depuis une demi-heure dans une région presque désertique quand subitement un coup de feu fait voler le pare-brise en éclats.

- Accélère, hurle Bruno en saisissant une arme. Mais avant d'avoir eu le temps de riposter, Bruno voit un soldat ennemi les viser. Le coup part : Bruno sent une secousse. Atteint en pleine poitrine, il roule au fond de la voiture en murmurant : ça y est, je suis mort.

D'autres coups de feu claquent : la voiture roule à plein régime. Lorsque enfin Bruno se redresse, tout étonné d'être encore vivant, la fusillade a cessé. La voiture continue sa course à toute vitesse, dans un nuage de poussière. Tout en conduisant, Edouard qui n'est pas blessé, tourne la tête vers Bruno, s'inquiétant de son état. Non, Bruno n'y comprend rien. La balle l'a bien atteint, et pourtant il ne ressent ni douleur, ni blessure. Il regarde sa veste. Elle a bien un trou et sans aucun doute, c'est la balle qui a ainsi transpercé le tissu. Je devrais être mort, pense-t-il encore. Il plonge alors sa main dans la poche intérieure de son vêtement et en retire un livre. En l'apercevant, il se souvient du moment où il préparait ses bagages, avant de partir à la guerre : sa soeur lui a alors glissé cette Bible. Pour ne pas lui faire de peine, il l'a fourrée dans la poche intérieure de sa veste, sans se douter qu'un jour, ce livre lui sauverait la vie.

Bruno tourne les pages. Au début, elles sont toutes trouées. La balle est restée dans l'épaisseur du papier. Curieux de savoir jusqu'où elle est allée, il la retire, et feuillette le livre. A mesure qu'il tourne les pages, les trous laissés par la balle deviennent de plus en plus petits. Il arrive enfin à l'endroit où elle s'est arrêtée, laissant un point au milieu d'un Psaume. C'est le septième verset du psaume 91. Le point laissé par la balle semble désigner ce verset comme on désigne quelque chose avec son doigt. Bruno sursaute en lisant :

IL EN TOMBERA MILLE À TON CÔTÉ, ET DIX MILLE À TA DROITE ; TOI, TU NE SERAS PAS ATTEINT.

Bruno ne peut détacher ses yeux de ce verset. Il lui est déjà arrivé de lire de temps en temps un passage de la Bible, machinalement, sans y faire vraiment attention, mais jamais jusqu'alors, il n'avait compris que cette Parole a une puissance ; la puissance d'arrêter une balle, la puissance de le sauver de la mort. Oui vraiment, ce n'est pas la balle que Dieu voulait faire pénétrer dans son coeur, mais bien plutôt cette Parole qui lui dit la bonté d'un Dieu qui l'a préservé de la mort, lui qui pourtant ne mérite rien. La voiture freine et s'arrête devant le poste de garde du quartier général :

- Mission accomplie, mission réussie.

Oui, bien sûr, mais ce que Bruno désire avant tout, c'est être seul. Et lorsqu'enfin, ce soir-là, il se retrouve dans une petite chambre, il relit encore le verset désigné par la balle. Oui, Dieu a voulu le sauver de la mort ; ne veut-Il pas le sauver aussi de la mort éternelle ? Alors Bruno se jette à genoux. Il prie jusqu'à ce qu'il ait la certitude que le Seigneur Jésus a effacé tous ses péchés. De retour dans son cantonnement, Bruno a montré sa Bible trouée à tous ses camarades. Il leur a raconté comment Dieu l'avait épargné de la mort, mais aussi comment Jésus était devenu son Sauveur.



UNE ARAIGNÉE

– Henri, sauve-toi! Les soldats du roi sont là. Henri saute au bas de son lit et regarde par la petite fenêtre du premier étage. Ce qu'il voit glace son sang dans ses veines. Le soleil n'est pas encore levé, mais la cour est pleine de soldats. Pas de doute, ils viennent fouiller la maison de la cave au grenier. Henri sait que c'est lui qu'on cherche. Il sait que le roi a donné ordre à ses soldats d'arrêter tous ceux qui annoncent l'Évangile. Or justement, Henri, inlassablement, parle de ce qui remplit son coeur : il parle de Jésus, de son Sauveur, de son Seigneur. – Que faire ? se demande Henri. Plus le temps de s'enfuir, il n'y a pas d'issue possible. Pas moyen non plus de s'échapper par une fenêtre, le maison est encerclée! Que faire ? se demande encore Henri avec angoisse. Sortant de sa petite chambre, il cherche désespérément une cachette où il serait en sécurité. Se tournant en tous sens, il aperçoit, tout au fond de la maison, dans une sorte de débarras, l'ouverture béante d'un ancien four à pain, construit dans l'épaisseur du mur. Ne trouvant pas de meilleure solution, il y court et se glisse à l'intérieur. Plein d'angoisse, il pense : – Je suis perdu, les soldats auront vite fait de me sortir de cette mauvaise cachette. Bientôt on entend les soldats pousser violemment la porte du rez-de-chaussée. Et pendant qu'ils fouillent en bas, Henri, dans son four, fait monter vers son Seigneur une ardente prière : – O Seigneur, sauve-moi! Sauve-moi, je T'en supplie! Mais alors que les recherches se poursuivent en bas, une araignée s'est mise au travail. Tissant un à un ses longs fils d'argent, elle construit sa toile... juste ... devant l'ouverture du four dans lequel tout tremblant Henri s'est blotti. Sans se presser, avec le soin d'un orfèvre, l'araignée croise ses fils jusqu'à ce qu'apparaisse devant le trou noir, une belle toile régulière et complète. Bientôt on entend les lourdes bottes dans l'escalier. Les soldats continuent leurs recherches à l'étage. Renversant les meubles, mettant tout sens dessus dessous, ils fouillent partout. Les voilà dans le débarras. Ils frappent de leurs armes les murs et le sol pour y découvrir une éventuelle cachette secrète. Henri sent les soldats à moins d'un mètre de lui. – Où peut se cacher ce gredin ? – En tous cas pas dans ce four, répond l'un d'eux. Le coquin en y entrant aurait détruit cette toile d'araignée. Retenant sa respiration, Henri a l'impression que son coeur bat comme un tambour. – Non, il n'est pas là, lance un soldat, après avoir planté son épée dans un vieux matelas. Bientôt le bruit des pas s'éteint dans l'escalier. Henri n'ose pas encore sortir de sa cachette, mais déjà de son coeur monte une prière de reconnaissance envers Celui dont la main n'est pas devenue trop courte pour délivrer (Ésaïe, chapitre 59, verset 1).



UN DIEU QUI PARDONNE

Denis, solidement ligoté à un arbre, considère sa Bible que les Indiens ont jeté si près du feu lorsqu'on l'a fait prisonnier. Ah, si seulement il avait eu le temps de leur parler de l'amour de Dieu. Il aurait voulu leur dire ce dont son coeur est rempli : leur dire qu'il y a autre chose que la haine, leur dire que Dieu les aime, eux les Indiens, leur dire aussi que Jésus est venu mourir sur une croix pour chacun d'eux. Mais les Indiens n'ont vu en lui qu'un ennemi, et c'est pour cela que Denis est attaché à cet arbre, attendant que, là-bas, un groupe de guerriers, assis en rond, décide de son sort. Serait-ce pour moi le bout du chemin ? songe-t-il. Mais ce que Denis ne sait pas, c'est que là-bas, dans l'ombre, deux yeux le regardent. Lumière des étoiles, la fille du chef indien, fixe de ses yeux noirs cet homme prisonnier dont le visage est si différent de celui des hommes de sa tribu. – Non, il ne faut pas qu'il meure, murmure Lumière des étoiles. Elle se souvient de ce que sa grand-mère lui avait dit avant de mourir : – Lumière des étoiles, disait grand-mère, il y a longtemps est venu au village, un homme blanc, pendant que les hommes étaient à la chasse. Il avait avec lui un livre qui parlait d'un Dieu qui pardonnait. Lumière des étoiles, disait encore grand-mère, lorsque notre peuple connaîtra le Dieu de l'homme blanc, alors nous connaîtrons le bonheur. Grand-mère n'était plus, mais l'homme blanc était là avec son livre, tout à fait semblable à celui dont grand-mère avait parlé. – Non, il ne faut pas qu'il meure. Soudain Lumière des étoiles disparaît dans la nuit qui maintenant enveloppe le village indien. Quelques instants après, des clameurs retentissent : – Au feu! Au feu! Les homme se sont levés et se précipitent... mais presque dans le même instant, Denis entend un pas léger derrière lui. – Ne bougez pas, mon couteau est tranchant. Ses liens coupés, Denis s'étire et considère la frêle enfant qui a déjà ramassé son livre, et qui l'entraîne vers son cheval rendu nerveux par l'odeur du feu. – Vite, il faut que vous partiez vite, murmure Lumière des étoiles avec insistance. Les membres encore engourdis, Denis parvient pourtant à se mettre en selle. – Partez, supplie la fillette, tandis que des cris avertissent que la fuite du prisonnier est découverte. Denis comprend alors qu'il ne peut laisser cette enfant aux mains de ces guerriers cruels. Peut-être voudront-ils se venger sur elle! La saisissant à bras le corps, il l'installe sur l'encolure de sa monture et part au galop. Le temps a passé. Les jours ont succédé aux jours. Quelques mois après, nous retrouvons le village indien. Assis tout près du feu, le chef de la tribu tremble de fièvre. Il tend ses mains et ses pieds à la flamme, essayant désespérément de se réchauffer. Tristement le chef songe : la terrible maladie qui dévaste la tribu va-t-elle l'emporter lui aussi comme elle a emporté déjà tant et tant d'habitants du village ? Absorbé par ses tristes pensées, il n'entend pas le bruit d'un pas léger derrière lui. Ce n'est que lorsqu'il sent la présence de quelqu'un près de lui qu'il sursaute et se retourne : – Oh! Lumière des étoiles, tu es revenue. Lumière des étoiles regarde son père. – Mais tu es malade ? Le chef regarde sa fille de ses yeux tristes. – Sais-tu, reprend-elle, que l'homme blanc n'est pas un ennemi ? Il a construit, loin d'ici, dans une clairière, une grande maison dans laquelle il soigne l'homme rouge et lui donne des remèdes contre la terrible maladie. Lumière des étoiles voudrait en dire davantage... elle parle avec animation en secouant ses lourdes nattes noires... Et sais-tu que le Dieu de l'homme blanc pardonne ? Le lendemain, le chef s'est mis péniblement en selle. Conduit par Lumière des étoiles, il a pris le chemin de la grande maison de l'homme blanc. Là-bas, il a reçu des médicaments des mains mêmes de celui qu'il avait voulu tuer quelques mois auparavant. Là-bas, Denis lui a parlé de son Dieu qui pardonne, de ce Dieu qui a donné son Fils Jésus pour sauver l'homme rouge. Et alors que la fièvre quitte le corps du chef indien, son coeur s'ouvre à l'amour du Dieu qui pardonne.



VENDU

 

Gongo, l'esclave noir, est enchaîné avec d'autres esclaves. Il regarde avec défi la foule qui se presse dans la salle du café de cette petite ville américaine. Il sait que pour tous ces gens, il n'est qu'une marchandise au milieu d'autres, une marchandise qui tout à l'heure sera vendue aux enchères. Il sait aussi que pour tous ceux qui le regardent, lui et ses compagnons, il n'a d'intérêt que par la somme de travail qu'il peut fournir, et le prix auquel il pourra être acheté. Pourtant, Gongo ne peut s'empêcher de jeter de temps à autre un regard inquiet vers l'homme au chapeau gris qui est assis au fond de la salle. Ce homme est un étranger ; on ne l'a jamais vu dans la région et ses vêtements montrent bien qu'il n'est pas d'ici. Serait-il venu, lui aussi, pour acheter un esclave ? songe Gongo au milieu du brouhaha des conversations. Être acheté par un étranger, quelle catastrophe pour un esclave! C'est pire que de devoir servir un maître dur et exigeant. Être acheté par un étranger, ça veut dire quitter son pays, sa famille, sa femme et ses enfants pour suivre son maître dans son lointain pays. Pourvu qu'il ne m'achète pas, songe Gongo avec angoisse. L'homme au chapeau gris est seul et ne parle à personne. Bientôt le silence se fait dans la salle : on annonce le début de la vente. Le premier esclave est proposé. Les enchères montent : 100 dollars! 120! 145 dollars! ...Le marteau tombe : un à un les esclaves sont vendus. Puis c'est au tour de Gongo... un homme s'est redressé : – 120 dollars! Gongo pâlit en réalisant avec terreur que celui qui vient de lancer ce prix ... est justement l'homme au chapeau gris. – Ne m'achetez pas! Je ne vous veux pas comme maître! D'autres acheteurs essayent de proposer davantage ... Mais inlassablement l'étranger augmente le prix. – 150 dollars! Gongo secouant ses chaînes hurle plein de colère : – Ne m'achetez pas, je ne vous servirai pas. Mais l'étranger, sans sourciller, continue : – 180 dollars! Gongo, en proie à une colère qu'il ne contrôle plus, montre son poing enchaîné à l'étranger : – Si vous m'achetez, je vous tuerai! Mais l'étranger, sans s'occuper de la fureur de l'esclave ni de ses menaces, lance un nouveau prix en réponse à un autre acheteur : – 195 dollars! Les autres acheteurs se taisent... Le marteau tombe : "Vendu". Gongo vient d'être acheté par l'homme au chapeau gris. Celui-ci se lève pour payer sa nouvelle acquisition, et lorsqu'il se dirige vers son esclave, un profond silence tombe sur la salle. Que va-t-il se passer ? L'esclave furieux va-t-il se jeter sur lui ? Chacun retient son souffle ... Gongo, tremblant de rage, voit l'homme au chapeau gris se diriger vers lui. Il s'arrête à quelques pas et s'adressant à lui avec un fort accent étranger : – Tu pensais que je t'achetais pour t'emmener loin de chez toi ? Si je t'ai acheté, c'est pour te délivrer et faire de toi un homme libre. Tu entends, tu es libre! Une à une les chaînes que l'étranger a ouvertes tombent. Gongo ne dit rien. Et ce n'est que lorsque l'étranger se tourne pour quitter la salle et s'en aller, que Gongo s'élance : – Maître, je veux te suivre. Je veux te servir, emmène-moi où il te plaira, je suis son esclave! Jésus non plus ne force personne à Le servir. Il nous a payé pourtant très cher. Non, pas une somme d'argent, mais Il a donné Sa vie pour nous sauver. Son sang a coulé pour te délivrer de l'esclavage du péché. Quelle est la réponse de ton coeur ? Ne vaut-il pas la peine de vivre pour Celui qui pour nous est mort et a été ressuscité ? Deuxième épître aux Corinthiens, chapitre 5, verset 15.



YOURI

– Youri Matovitch, c'est vous ? – Oui, c'est moi. – Eh bien, au nom de la loi, je vous arrête! – Mais qu'est-ce que j'ai fait ? – Allez, allez, vous savez cela mieux que nous. Sans savoir ce qui lui arrive, Youri se retrouve bientôt enfermé dans une cellule de prison. Une fenêtre bardée de fer, des murs gris, un lit, une table, et une porte métallique qu'on referme sur lui, c'est tout. – Je suis innocent, je suis innocent, crie Youri en frappant la porte de ses deux poings. Non, Youri ne sait pas ce qu'on lui reproche. Pourtant, en écoutant les gardiens parler entre eux dans le couloir, Youri apprend qu'on le considère comme un dangereux prisonnier politique. – Je suis innocent, je suis innocent, clame-t-il, je ne sais même pas ce qu'on me reproche. Hélas, ce qu'on lui reproche, il l'apprendra bientôt, lorsque debout dans la salle du tribunal, il entendra le juge déclarer lentement : – Youri Matovitch, vous êtes accusé d'avoir participé à un complot contre le Tsar, aussi êtes-vous condamné à mort. La terrible sentence résonne dans la salle. Youri, pâle, incapable d'un mouvement, l'entend comme dans un cauchemar dont il ne parviendrait pas à se réveiller. Reconduit dans sa cellule, Youri se jette sur son lit en proie au plus profond désespoir. Il sait qu'il n'a pas participé au complot contre le Tsar et qu'il est l'objet d'une lourde erreur judiciaire. Il est si absorbé dans ses tristes pensées, qu'il n'entend pas la clé tourner dans la serrure. La porte s'ouvre, livrant passage à un petit homme chauve aux yeux ronds. – Monsieur Matovitch, je viens vous apporter les consolations de Dieu. Youri se lève comme un ressort et rit d'un rire inquiétant. – Sortez immédiatement, je n'ai que faire d'un Dieu qui permet qu'un innocent soit condamné. Allez-vous en ou je demande au gardien de vous faire sortir d'ici. Youri s'avance, l'air menaçant. Le petit homme recule, mais avant de sortir, il dit en posant un livre sur la table toute proche : – Je vous laisse une Bible. Youri, tremblant d'une colère qu'il ne contrôle plus, saisit le livre en s'écriant : – Eh bien, voilà ce que j'en fais de votre livre. Et, aussi fort qu'il le peut, y mettant toute sa rage, Youri lance le livre contre la muraille. Le livre vole, heurte le plâtre avec un bruit mat, puis tombe sur le sol. Les jours suivants, Youri marche dans sa cellule comme un fauve en cage. Il passe du plus profond abattement à des crises de rage incontrôlées. Or, un soir, alors qu'il arpente sa cellule, en proie aux plus tristes pensées, son pied heurte le livre qui est resté sur le sol. A ce moment le soleil commence à disparaître derrière les collines. De ses rayons obliques, il caresse la cime des grands arbres. L'un d'eux, plus indiscret, filtre à travers la fenêtre de la prison de Youri et vient éclairer le livre ouvert que Youri vient de ramasser machinalement. Le soleil s'est posé sur ce verset : – "Il n'y a pas de juste, non pas même un seul." Youri le lit d'abord sans y prendre garde, mais bientôt il sursaute : – pas de juste... même pas lui, Youri qui crie son innocence depuis qu'il est enfermé... ? Youri s'approche de la fenêtre pour avoir davantage de lumière, il lit que "Tous ont péché". Youri réfléchit : bien sûr, il n'a pas participé au complot contre le Tsar, mais... est-il juste pour cela ? Il repense à sa vie. N'a-t-il pas crié un peu trop fort son innocence!... surtout vis-à-vis d'un Dieu qui a les yeux trop purs pour voir le mal. Il tourne les pages... - "Venez et plaidons ensemble, dit l'Éternel : si vos péchés sont comme le cramoisi, ils deviendront blancs comme la neige..." Là-bas, vers les collines, on voit encore les dernières lueurs du couchant. Malgré l'ombre qui envahit tout, Youri essaye encore de lire... Il lit, il songe, il prie... Et là, dans sa prison, il comprend que non seulement il n'est pas innocent, mais que devant Dieu, il est perdu. Le livre qu'il avait jeté si rageusement contre la muraille lui apprend aussi que Jésus, le Fils de Dieu est venu chercher et sauver ce qui est perdu. La lueur du soir doucement se retire, mais une autre lumière, une lumière éclatante, une lumière bienfaisante grandit dans son coeur. Cette nuit-là, Youri se couche et dort paisiblement, comme il n'a pas dormi depuis bien longtemps. Le jour où Youri doit mourir est arrivé. Youri est prêt. Assis sur son lit, il feuillette le livre qui lui a apporté tant de consolation et qui est devenu pour lui un véritable trésor. Tout à coup, Youri entend la clé tourner dans la serrure. Il frissonne. Une haute silhouette vient s'encadrer dans l'embrasure de la porte. Le Tsar, le Tsar en personne. Youri se lève, en le reconnaissant. L'empereur s'approche, un papier à la main. - Youri, Matovitch, nous venons d'avoir la preuve de votre totale innocence dans le complot qui avait été organisé contre moi. Cette lettre atteste de votre fidélité à votre empereur. Aussi ai-je voulu vous libérer moi-même et vous assurer que vous serez dédommagé de toutes les misères que vous avez connues en prison. Vous êtes donc libre. Youri sort de la prison, mais avant de suivre le Tsar qui le précède, il ne peut s'empêcher de jeter un regard sur sa pauvre cellule : la fenêtre avec ses barreaux, la table, le lit, les murs gris... Oui, murmure-t-il, c'est là que j'ai appris à connaître la vraie liberté.